Un atelier d’enluminure au XIXe siècle
Comment mettre en couleur à la main les lithographies imprimées en noir
Madame Élisa Mantois dirige un atelier d’enluminure dédié à la mise en couleur des planches lithographiques. Des coloristes, uniquement des femmes, travaillent sous sa direction selon un rigoureux partage des tâches. Dans ce chapitre, nous proposons une reconstitution d’un atelier d’enluminure au XIXe siècle, à partir d’une recherche documentaire très précise décrivant l’espace, le mobilier et l’outillage, ainsi que le mode d’organisation type de tels ateliers.
Nous avons également réalisé une enquête approfondie sur les traces de Madame Mantois, dont nous rendons compte de différentes façons.
L’on sait peu de choses sur Élisa Mantois, mais il semble qu’elle ait très jeune exercé une activité d’enluminure pour des ouvrages illustrés, ce qui laisse supposer une formation spécifique dès l’adolescence.
Elle a suivi en particulier les cours faits par Monsieur Michel-Eugène Chevreul, chimiste français et théoricien des couleurs à l’origine de la définition du « contraste simultané ».
Née au début du XIXe siècle, Jeanne Françoise Élisa Bremant épouse en 1831 à Paris un graveur peu connu, Albert Mantois, et devient Madame Mantois, mère de plusieurs enfants dont une fille qui exercera elle aussi une activité de coloriste.
Très vite, elle se spécialise dans le coloriage d’ouvrages de médecine et d’anatomie tout à fait importants et il semble que ses liens avec l’équipe de dessinateurs et de lithographes réunie par le dessinateur-lithographe Nicolas-Henri Jacob aient été aussi professionnels qu’amicaux, puisqu’ils habitent le même immeuble, au 14 rue du Pot-de-Fer-Saint-Sulpice jusqu’en 1849, et que Jacob est le parrain des deux filles du couple Mantois.
Durant plus d’une trentaine d’années, elle dirige un atelier d’enluminure employant des jeunes femmes et travaillant à la mise en couleur de nombreux ouvrages lithographiés en noir, dont l’édition C.-A. Delaunay de l’atlas de Bourgery et Jacob : « Traité complet de l’anatomie de l’Homme », publié entre 1831 et 1854.
Elle est plusieurs fois distinguée par des prix, pour son activité d’enluminure comme pour une préparation à base de blanc de zinc dont elle contribue à répondre l’usage afin de remplacer le blanc de plomb instable et toxique. En 1851, elle rédige une série articles historiques et techniques sur le coloris pour les Annales de l’Imprimerie. Outre ses contributions à des ouvrages scientifiques, ses recherches sur les matières colorantes sont mentionnées dans différents ouvrages spécialisés parus au milieu du XIXe siècle.
Elle présente ses lithographies coloriées dans différentes Expositions universelles, à Londres en 1852, puis à Paris 1854.
Au début des années 1860, elle apparaît encore au 7 rue de Furstenberg, toujours dans le VIe arrondissement. Elle semble tenir un atelier-boutique où l’on peut faire l’acquisition des couleurs qu’elle prépare.
La vie de Madame Élisa Mantois
Racontée en images par Julie Escoriza.
Texte de Martial Guédron et Olivier Poncer.
